Le confinement a permis le déploiement massif du télétravail sur tout le territoire et de manière extrêmement rapide. Malgré une chute avec le déconfinement faisant passer le taux de télétravailleurs de 30 % à 17 %, le télétravail est une solution qui plaît autant aux employeurs qu'aux employés.
Essayons de comprendre ensemble pourquoi le télétravail séduit, pourquoi la France est en retard par rapport à ses voisins, son impact sur l'économie et l'écologie et notre quotidien.
En 2020, un tiers des travailleurs français se retrouvent concernés par le télétravail ce qui représente environ 10 millions de Français. Ce chiffre peut sembler énorme mais ce n’est rien comparé à nos voisins Anglais et Scandinaves adeptes et experts de cette méthode qui voient plus de 40 % de leurs emplois réalisables en télétravail selon une étude de l'Université de Chicago.
3 facteurs peuvent déterminer la part de télétravailleurs pour un pays :
En France, malgré un niveau de développement élevé, le secteur agricole représente 3,5 % du PIB et plus de 880 000 emplois tandis que le tourisme 7,4 % pour 2,87 millions d’emplois. Si l’on rajoute à cela la difficulté des entreprises françaises à réaliser la bascule vers le numérique, le télétravail peine à s’installer durablement.
L’aspect culturel et organisationnel de l’économie française s’avère également être un frein. Les managers français sont timorés à l’idée d’installer le télétravail et préfèrent le « présentiel » pour des raisons culturelles. Pour illustrer ces caractéristiques, nous pouvons nous appuyer sur la « carte culturelle » de rédigée par Erin Meyer, professeure à l’INSEAD.
Voici certains critères expliquant les méfiances des Français vis-à-vis du télétravail :
Le télétravail se révèle être un phénomène ambigu et instable, relatif à de nombreux aspects d’un pays, d’une culture, d’une économie.
Selon les économistes français Antonin Bergeaud et Simon Ray, une négociation entre salariés et l’entreprise est inévitable concernant les différentes économies réalisées grâce à ce mode de travail.
L’entreprise mettra en avant les bénéfices en matière de bien-être des salariés ainsi que la diminution des temps de trajet qui s’avère être une économie non négligeable.
De leur côté, les salariés se défendront en prouvant que ces économies serviront à financer d’éventuels espaces supplémentaires chez eux, une utilisation de plus d’énergies (électricité, chauffage etc.).
Selon une étude parue en 2017, les salariés sont prêts à diminuer à hauteur de 8 % leur salaire en échange de travailler à domicile.
Avec la hausse de l’immobilier, les loyers occupent une partie plus importante au budget des entreprises passant de 15,3 % à 13,5 % en l’espace de 15 ans. Cette augmentation suggère que le télétravail peut modifier structurellement les coûts et le bilan des sociétés.
Toujours selon eux, l’immobilier s’avère être un obstacle majeur à la croissance. Cette propagation du télétravail s’inscrit donc comme une opportunité à ne pas négliger pour les entreprises.
Une interrogation subsiste quant à la mise en place du télétravail, la productivité. Selon les économistes, il faut « se méfier d’un possible biais à court terme, dans la mesure où le télétravail peut intuitivement provoquer une réduction des dépenses à court terme tout en détériorant la productivité à moyen terme. »
17,3 %, c’est le pourcentage de télétravailleurs habituels en France. Leur temps de télétravail s’élève à 1,3 jour de télétravail par semaine.
Les télétravailleurs travaillent plus que les autres actifs : 5,5 jours par semaine contre 4,8 jours. Les journées de travail sont également plus longues mais on constate que ce paramètre ne les empêche pas d’apprécier ce mode de fonctionnement. La gestion du stress, la productivité et la concentration sont améliorées.
Cette pratique offre la possibilité aux télétravailleurs de réorganiser leur journée de manière optimale pour eux en gérant leur temps comme ils le souhaitent.
Cela peut paraître paradoxal, mais selon l’ADEME (Agence de la Transition Écologique), les télétravailleurs réguliers réalisent plus de déplacements que les autres travailleurs. (6 déplacements de plus par semaine). Ces chiffres s’expliquent par la composition familiale des télétravailleurs. La forte proportion des ménages avec enfants parmi les télétravailleurs joue un grand rôle. On constate une différence allant de 70 km à 95 km entre les ménages sans enfants et avec enfants.
En libérant du temps dans leur journée, le télétravail peut créer de nouveaux déplacements liés aux loisirs par exemple. D’un point de vue écologique, le bilan carbone s’alourdit, il faut donc que chaque personne qui télétravail prenne conscience de ces effets rebonds en se disant « puisque je télétravaille, je me déplace moins ».
En ce qui concerne les modes de transports, les télétravailleurs ont plus souvent recours aux transports en commun (42 %). Ces résultats s’expliquent par le fait qu’ils sont ultra-représentés en zones urbaines des métropoles françaises.
La distance entre le lieu de travail et le lieu de résidence ne constitue pas un élément favorisant le télétravail. On constate que le temps de trajet pour se rendre sur leur lieu pour les télétravailleurs (33 minutes) et les travailleurs (27 minutes) sont quasiment identiques.
Avec la transition numérique des entreprises, les entreprises favorisent l’envoi d’émail à l’impression, l’e-commerce à la boutique et également de plus en plus de salariés délaissent leur bureau au profit du télétravail. Cette évolution s’accompagne d’une idée reçue trop bien trop généralisée à savoir : tout est stocké dans le « cloud » donc il n’y a pas de pollution.
Ce « nuage » pèse pourtant bien plus que ce que l’on croit. Chargé en CO2 et remplit de serveurs qui stocks l’ensemble des données échangées on est bien loin du petit Cumulus qui flotte au-dessus de nos têtes.
Selon l’ADEME toujours, le numérique représente à lui seul l’équivalent de ce que rejette l’Inde en termes de gaz à effet de serre à savoir 1 800 millions de CO2 ! C’est plus que le transport aérien mondial. Pour continuer sur les chiffres alarmants, en 1 an à raison de 30 email (de 1 Mo), un employé émet 136 kg de CO2. Cela représente 13,6 tonnes pour une entreprise de 100 salariés soit 2 fois le tour de la Terre en avion !
En cette période de confinement et avec la généralisation du télétravail, le surinvestissement du numérique devient également une menace écologique à prendre en compte.